Lundi 22 février
Les élections régionales des 14 et 21 mars prochains seront les cinquièmes du genre. C’est la loi du 2 mars 1982, dont l’initiative revient à Gaston Defferre, ministre socialiste de l’Intérieur sous le gouvernement Mauroy, qui a institué l’élection des conseils régionaux, dont le mandat est de six ans. À ce moment-là, il existait déjà des « régions » dont l’histoire remonte à la IVe République. Dans les années qui suivirent la Libération, on prit conscience en effet du caractère archaïque des départements, créés par la Révolution de 1789, dont la superficie répondait à la possibilité de gagner à cheval le chef-lieu et d’en revenir dans la même journée. Un arrêté pris en 1956 découpait administrativement le territoire français en 22 régions sur la base d’un regroupement de départements. Le découpage était confirmé par le nouveau régime né en 1958. Mais ces 22 régions, mis en place sous la forme d’établissements publics, avaient à leur tête un préfet de région, tandis que le conseil régional, nommé mais non élu, était consultatif. C’est la loi Defferre qui reconnaît aux régions le titre de collectivités territoriales : un conseil régional sera élu au suffrage universel et son président détiendra le pouvoir exécutif. La première élection a eu lieu le 16 mars 1986. C’est seulement en 2004 que le mode de scrutin à deux tours fut instauré.
Les deux premières élections, en 1986 et 1992, sous la présidence de Mitterrand, la droite l’emporte nettement. Celles de 1998, alors que Chirac est président et que Jospin est Premier ministre, les élections sont plus disputées, mais, finalement, grâce aux alliances avec le Front national, la droite finit par contrôler 14 régions, contre 8 pour la gauche. Enfin, en 2004, la gauche prend une éclatante revanche en remportant la victoire dans 20 régions sur 22 (seules, la Corse et l’Alsace lui échappent). Le résultat est dû en partie au maintien du Front national au second tour dans 17 régions alors que Jacques Chirac a pu convaincre les candidats de droite de ne se prêter à aucune alliance avec le Front national. Les « triangulaires » ont été fatales à la droite face à une puissante poussée de la gauche.
Les sondages donnent aujourd’hui la gauche largement gagnante le 21 mars. Depuis 1986 les régionales paraissent ainsi le temps du rééquilibrage politique, la victoire revenant à l’opposition, à la droite sous Mitterrand, à la gauche sous Chirac ; sans doute encore à la gauche sous Sarkozy. Seules les élections de 1998 laissent un doute sur cette espèce de loi de compensation, mais s’il est vrai qu’alors le président était Jacques Chirac, nous étions en période de cohabitation, c’est-à-dire de confusion politique.
Plus que ces variations partisanes, l’important est l’existence de ces régions, dont l’identité culturelle s’affirme de plus en plus, via les associations, les musées, les écomusées, la mise en valeur d’un patrimoine ethnographique et archéologique, les festivals, la remise en valeur de savoir-faire traditionnels et la défense de l’environnement. La loi de 1982 a provoqué une révolution tranquille dans un pays profondément marqué par la centralisation jacobine et bonapartiste. Révolution encore loin d’être achevée : les départements et les préfectures restent des réalités, les moyens dont disposent les régions sont encore limités, et la conscience régionale a des progrès à faire si l’on en croit les sondages qui nous promettent un taux record d’abstention pour le prochain scrutin.
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.