Mardi 9 février
En 1995, j’avais publié un ouvrage, Parlez-moi de la France, dont l’idée m’était venue à Moscou et à Saint-Pétersbourg, à la suite de deux séjours que j’y avais faits dans les années qui avaient suivi la fin de l’URSS. À la demande d’étudiants curieux de connaître l’Ouest, j’avais tenté de dessiner un portrait historique de la France que j’avais ensuite développé en livre. Celui-ci étant épuisé depuis plusieurs années, je me suis attelé à son actualisation. Au vu des changements qui se sont produits en quinze ans, on mesure à quel point la notion d’ « identité nationale » est mouvante, tributaire des événements qui se succèdent et des transformations en profondeur moins visibles qui modifient nos façons de voir et de juger.
Sans vouloir être exhaustif, je note pour la France : la suppression du service militaire (1997), la nouvelle loi sur la nationalité (1997), les 35 heures de travail hebdomadaire (1998), le PACS (1998), la parité entre hommes et femmes (2000), le remplacement du septennat présidentiel par le quinquennat (2000), l’instauration du congé de paternité (2001), la révision du régime des retraites (2003), l’interdiction du port des signes religieux à l’école (2004), l’échec du référendum sur le traité constitutionnel (2005) et l’adoption du traité de Lisbonne (2008), les révisions constitutionnelles (2008), l’adoption du RSA remplaçant le RMI (2009). Autant de lois qui ont provoqué des débats, remis en cause des certitudes. Et je ne parle pas des révolutions technologiques : le téléphone mobile et Internet qui ont changé les modes de vie.
Le plus clair est que la France est de plus en plus imbriquée dans l’histoire planétaire, qu’il s’agisse des effets en chaîne des attentats du 11 septembre à New-York, suivis par les guerres d’Afghanistan et d’Irak, de l’échec des accords d’Oslo au Proche-Orient, de l’élargissement de l’Union européenne, ou qu’il s’agisse de la crise financière de 2008 et de ses conséquences économiques.
Nos habitudes mentales sont encore terriblement francocentristes, alors que l’interdépendance des États se renforce chaque jour. J’y pensais à propos de la refondation toujours recommencée du Parti Socialiste : est-il possible aujourd’hui de penser son avenir indépendamment de la dimension européenne, pour ne pas dire mondiale, de nos conditions de vie ? La perspective de construire un grand parti social-démocrate européen ne devrait-elle pas s’imposer ? C’est un exemple parmi d’autres que je prends dans l’actualité politique : l’écart est souvent profond entre les réalités objectives de nos existences et les représentations restreintes que nous en avons par habitude.
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